GRAND DÉBAT NATIONAL :
4 MESURES POUR UN DÉBUT DE SORTIE DE CRISE.
1– CRÉER DES AUDITS CITOYENS
Malgré la contestation de l’impôt, les Français manifestent un attachement à l’action publique. Dans notre baromètre annuel « les Français et les services publics locaux », ils se déclarent à 80 % satisfaits des prestations délivrées par les collectivités locales. Interrogés sur 15 politiques publiques, ils n’ont manifesté pour aucune d’entre elles une volonté de baisse de moyens.
Il est illusoire de croire que nous sortirons de cette contradiction en quelques mois de concertation. Si l’on veut parvenir à décanter sereinement des choix entre impôts et ser- vices publics, il faut permettre aux Français de constater par eux-mêmes la façon dont est utilisé l’argent public. Ainsi, la création d’audits citoyens leur permettrait de participer direc- tement à l’évaluation des dépenses publiques. Il s’agirait, comme cela a été fait pour l’exer- cice de la justice, d’intégrer des citoyens, volontaires ou tirés au sort, dans les équipes qui ont aujourd’hui la tâche de contrôler l’action publique : Chambre des comptes, Cour des Comptes, etc. Cette participation active renouvellerait le lien entre le citoyen et l’action publique. Cette dernière trouverait par ailleurs avantage à ce que les usagers puissent mieux découvrir, de l’intérieur, le fonctionnement des structures publiques, leurs contraintes, leurs réussites. Le recul des poncifs et des carica- tures anti action publique est aussi à ce prix.
2– SUPPRIMER LE MILLEFEUILLE ADMINISTRATIF
Arbitrer entre moins d’impôts ou moins de politiques publiques s’inscrira dans le temps long. Dans l’attente, il faut creuser les pistes, peu nombreuses et tenant d’abord aux structures administratives, qui permettent de produire des gains financiers sans dégrader le service rendu aux Français. Comment comprendre aujourd’hui que les services publics de l’économie, du sport, de la culture, de la jeunesse, de l’environnement, du logement, existent en double dans chaque territoire, à travers l’administration de l’État et celle des collectivités locales ? La suppression de ces doublons pourrait s’opérer en décidant le transfert, dans le giron des collectivités locales, des 100 000 agents des services déconcentrés de l’État, hors compétences régaliennes. Le regroupement d’équipes dont les missions se chevauchent pourrait ainsi dégager sur 5 ans une économie d’environ 30 000 postes. Le millefeuille est ainsi moins dans les institutions poli tiques que dans l’organisation administrative et on a trop tardé, sans doute en raison de notre culture jacobine, à explorer cette sérieuse piste d’économie.
3– CHANGER L’APPAREIL D’ÉTAT
Le pays ne pourra se réformer si les équipes d’hommes et de femmes qui dirigent les ministères et travaillent en cabinets ministériels ne s’ouvrent pas à des profils différents, qui connaissent mieux la réalité du pays, n’appartiennent pas au même milieu social, ne sont pas tous issus de la même école, voire de la même promotion. Emmanuel Macron avait annoncé la reforme d’une Haute administration d’État trop fermée sur elle-même mais ne l’a pas mise en œuvre. Comment s’étonner alors de la déconnexion si souvent évoquée entre Paris et la province, entre le pouvoir central et les collec- tivités locales ? Pour que la France change, il faut que la sociologie de ses décideurs publics évolue. Aussi, on pourrait appliquer une règle proche de ce qui fut fait pour faire progresser la parité. Quand le gouvernement a à effectuer 3 nominations sur un poste de direction à l’État, il s’oblige à designer au moins une personne non issue du sérail : un dirigeant de collectivité locale, d’un hôpital, un cadre venu du privé, un dirigeant associatif, bref un profil de terrain. La nomination du directeur général de l’agence nationale de cohésion des territoire sera-t-elle l’occasion pour le gouvernement d’envoyer ce signal ? Il s’apprêterait à nommer…un haut fonctionnaire d’État !
4– IMPOSER L’IMPLANTATION DE MÉDECINS DANS LES DÉSERTS MÉDICAUX
L’ordre national des médecins vient de publier une étude qui montre la stricte correspondance entre la carte des déserts médicaux et celle de la mobilisation des gilets jaunes. La fracture territoriale face à la santé est l’une des plus durement ressenties. Et pour cause, la densité moyenne s’établit à 270,3 médecins pour 100 000 habitants, l’écart allant du simple au quadruple entre l’Eure (154,3) et la ville de Paris (687). Les démarches incitatives n’offrent que de modestes résultats. Aussi, la puissance publique pourrait désormais décider de la primo-installation des médecins généralistes pour les cinq premières années d’exercice de leur profession. Une telle contrainte, nécessaire pour l’intérêt général, n’aurait, pour les médecins, rien d’inacceptable. Leur formation comme leur activité ne sont-elles pas des dépenses socialisées, payées par les cotisations sociales et l’impôt ?